Cross, chant des collèges résonne encore longtemps après avoir refermé la dernière page. Blake n’a rien d’extraordinaire, c’est une ado comme tant d’autres qui face aux harcèlements relève la tête et se bat. La narration forme un puzzle, où les séquencent s’enchainent et s’accélèrent. C’est ce combat titanesque de David contre Goliath qui m’intéresse. Si Blake perd pied, c’est toute la société qu’elle interroge par son geste, une question ouverte de comment peut-on mettre fin au harcèlement à l’école ou sur les réseaux sociaux.

La force de l’écriture de Julie Rosselot-Rochet réside dans sa structure, dans sa solidité, dans sa force de précision et en même temps dans sa portée onirique et mythologique. Blake endosse le rôle d’une héroïne qui face à la fatalité se bat avec détermination et courage. Son parcours nous en apprend sur nous, sur notre société, sur nos lacunes, nos faiblesses et notre capacité à changer. Le camps de migrant en toile de fond de ses allers/retours au collèges vient poser plusieurs niveaux de lecture sur le harcèlement, les valeurs, les discours, la réalité, la difficulté du quotidien, l’entraide et la fatalité. Au plateau un chœur se déploie pour décrire, porter, commenter et soutenir Blake dans ce qu’elle traverse. Les personnages prennent vie avec des costumes/symbole où l’accessoire campe une figure, un surveillant, un prof, un parent.

Ce qui m’intéresse dans cette création, c’est l’ouverture possible sur un débat, sans nier la violence du harcèlement à l’âge de l’adolescence où tant de choses se structurent chez les jeunes filles et les jeunes garçons. La lecture du texte m’a donné envie de pousser cette veine mythologique où l’héroïne au sens premier du terme se bat contre des forces supérieures qui la dépassent, où le chœur la regarde et porte la parole de nous tous, où le chant des morts résonnent pour instruire les vivants sur cette histoire qui sévit encore dans les collèges et qu’on appelle rapidement le harcèlement.

Baija Lidaouane, Metteuse en scène